La présidence syrienne a proclamé samedi 19 juillet un « cessez-le-feu immédiat » dans la province de Soueïda, théâtre de violents affrontements intercommunautaires ayant causé plus de 900 morts depuis le 13 juillet. Malgré cette annonce, les combats n’ont pas cessé à l’entrée de la ville, opposant toujours des combattants druzes et tribaux.

Avant cela, l’ambassadeur américain en Turquie, Tom Barrack, avait révélé un accord de cessez-le-feu conclu entre la Syrie et Israël, soutenu par la Turquie, la Jordanie et plusieurs pays voisins. Dans un communiqué, Damas a appelé « toutes les parties à respecter pleinement » l’arrêt des hostilités et a promis de protéger « toutes les minorités et communautés du pays ». Le gouvernement a également redéployé ses forces dans la province, autrefois opposé à toute intervention militaire dans cette région.

Un cessez-le-feu fragile

Samedi matin, les forces de sécurité intérieure ont entamé leur déploiement à Soueïda pour tenter de ramener le calme. Toutefois, selon des témoins, des échanges de tirs sporadiques persistaient. Le ministère de l’Intérieur a justifié cette opération par la nécessité de protéger les civils et de « mettre fin au chaos ».

Sur le terrain, les principaux belligérants – les communautés druze et bédouine – n’ont toujours pas reconnu officiellement le cessez-le-feu, comme l’a souligné le correspondant régional Paul Khalifeh. Le climat reste donc extrêmement tendu.

Un bilan humain dramatique

D’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), les violences ont coûté la vie à 940 personnes, dont 588 Druzes – parmi eux, 262 civils et 326 combattants – et 312 membres des forces gouvernementales. L’ONG affirme que des forces liées aux ministères de la Défense et de l’Intérieur ont exécuté sommairement 182 Druzes. Côté bédouin, 21 morts sont recensés, dont trois civils exécutés par des combattants druzes. Par ailleurs, 15 soldats syriens auraient péri sous des frappes israéliennes.

L’hôpital de Soueïda, seul encore en service, a accueilli plus de 400 corps depuis lundi. « Ce n’est plus un hôpital, c’est une fosse commune », a déclaré Rouba, membre du personnel soignant. Privée d’eau, d’électricité et de communications, la ville est plongée dans une situation humanitaire désastreuse. « Il n’y a même plus de lait pour nourrissons », alerte Rayan Maarouf, rédacteur en chef du média local Suwayda 24. Le Comité international de la Croix-Rouge s’est dit « profondément préoccupé » par cette dégradation rapide.

Une crise qui déborde les frontières

Les violences de Soueïda gagnent du terrain en Syrie et même au Liban. Plus de quarante tribus syriennes ont lancé un appel à la mobilisation générale, envoyant des renforts vers le sud du pays. Des milliers de combattants ont ainsi convergé vers Soueïda dans la nuit du 18 juillet.

Au Liban, les tensions communautaires entre Druzes et Sunnites se sont également intensifiées. Les chefs religieux et politiques des deux camps ont exhorté à la retenue, sans grand effet.

Une menace sur l’unité syrienne

Malgré les appels répétés à la paix, la violence continue de miner l’unité nationale. Le diplomate américain Tom Barrack a plaidé pour que Druzes, Bédouins et Sunnites déposent les armes et bâtissent ensemble « une identité syrienne unie ». Mais la réalité sur le terrain est bien plus sombre.

Les nouvelles autorités syriennes peinent à garantir la sécurité des minorités. En mars, un massacre de 1 700 Alaouites avait déjà mis en lumière leur impuissance. « Les autorités avaient promis que cela ne se reproduirait pas. Mais sept mois plus tard, les mêmes horreurs frappent les Druzes. C’est le signe que quelque chose ne va pas », confie un militant pacifiste druze sous couvert d’anonymat.

Le rôle ambigu d’Israël

Israël, qui a annexé le plateau du Golan en 1967, s’est cette fois positionné en protecteur des Druzes. Ses frappes sur Damas ont contraint les forces syriennes à se retirer de certaines zones. Cette implication soulève des inquiétudes : certains Druzes y voient une aide salutaire, d’autres redoutent les intentions d’Israël. « Sans Israël, un génocide serait peut-être en cours. Mais leur soutien n’est pas désintéressé. S’ils interviennent, personne ne sait jusqu’où cela ira », ajoute l’activiste.

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