Exfiltré de Bissau vers Dakar puis Brazzaville, Umaro Sissoco Emballo, président déchu de Guinée-Bissau, multiplie les manœuvres souterraines pour empêcher la publication des résultats électoraux qui donnent vainqueur l’indépendant Fernando Dias da Costa. Entre valises d’argent, pressions sur la Commission électorale et tensions croissantes au palais de Brazzaville, Confidentiel Afrique révèle les dessous d’un plan de confiscation du pouvoir orchestré dans l’ombre.

La crise politique en Guinée-Bissau a franchi un nouveau seuil d’intensité. Depuis sa double exfiltration rocambolesque vers Dakar puis Brazzaville, organisée par Denis Sassou N’Guesso, Umaro Sissoco Emballo ne cesse de manœuvrer pour influencer le cours de la transition et empêcher la publication des résultats du scrutin présidentiel et législatif.

Selon des informations exclusives recueillies par Confidentiel Afrique, l’ancien chef de l’État exerce une pression constante sur les putschistes de Bissau, leur intimant de bloquer la Commission électorale nationale (CNE) afin que les résultats — qui créditent largement l’indépendant Fernando Dias da Costa — ne soient pas rendus publics.

Une exfiltration aux airs de conspiration internationale

L’exfiltration précipitée d’Emballo vers Brazzaville, après un bref séjour mouvementé à Dakar, a été facilitée par un vol spécial d’Afrijet affrété directement par Sassou N’Guesso. Mais ce transfert, loin d’être une simple opération humanitaire, cacherait un plan plus vaste de renversement du processus électoral en Guinée-Bissau.

D’après des sources sécuritaires, un avion privé en provenance du Venezuela a atterri à Bissau quelques jours avant la réunion secrète qu’Emballo a tenue avec plusieurs généraux, dont le nouvel homme fort du pays, N’Tam Horta. À bord : deux mallettes remplies d’argent, destinées à « arroser » des officiers militaires essentiels dans le projet de confiscation du pouvoir.

Chaque général aurait reçu 300 millions de FCFA (environ 500 000 euros), pour un total estimé à 4 milliards de FCFA, fonds acheminés via des émissaires du président Nicolás Maduro. L’objectif : faire basculer les militaires en faveur d’une annulation du scrutin et maintenir Emballo dans le jeu politique.

Le rôle ambigu de Dakar et la fermeté d’Ousmane Sonko

Selon les informations obtenues, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye aurait accepté d’accueillir « le colis encombrant » à la demande de Sassou N’Guesso, sans mesurer les implications diplomatiques de cette décision.

Mais le Premier ministre Ousmane Sonko, très critique sur la situation, n’a pas caché son opposition à cette présence sur le sol sénégalais. « Agacé par la tonalité du discours d’Ousmane Sonko », écrit Confidentiel Afrique, Emballo aurait réclamé son transfert immédiat au Congo.

Deux autres chefs d’État — João Lourenço (Angola) et Recep Tayyip Erdoğan (Turquie) — auraient refusé de prendre ses appels, tandis que l’ambassadeur de Guinée-Bissau à Dakar aurait été reçu… par personne.

Pressions intenses sur la Commission électorale : la ligne rouge

Depuis Brazzaville, Emballo a multiplié, lundi 1er décembre, les appels au président de la CNE, N’Pabi Cabi, pour l’enjoindre d’annuler les élections. Ce dernier a refusé de répondre.

Quelques heures plus tard, des militaires lourdement armés ont fait irruption à son domicile pour lui ordonner l’arrêt du processus électoral.
Cabi, en possession de tous les procès-verbaux, sait que la victoire de Dias da Costa est incontestable. Il craindrait aujourd’hui pour sa vie et celle de sa famille.

Selon des sources concordantes, il aurait contacté l’activiste Gervasio Sylvain Lopes aux alentours de minuit, cherchant une issue ou une protection.

Violences ciblées : un député de la CEDEAO agressé et séquestré

Ce mardi matin, le député Marciano Indi, représentant au Parlement de la CEDEAO, a été intercepté près de l’aéroport de Bissau alors qu’il tentait de se rendre à Abuja.
Il a été tabassé, séquestré et embarqué de force par les miliciens d’Emballo, un groupe formé récemment par les forces spéciales congolaises — un fait lourd de conséquences diplomatiques.

Brazzaville commence à perdre patience

Si Sassou N’Guesso lui a offert une résidence et une protection initiale, la présence turbulente d’Emballo à Brazzaville commence à irriter.

Selon des sources internes, des conseillers influents du président congolais se distancient de lui, jugeant sa posture « fourbe » et « inélégante ».
Sa virée programmée à Oyo, fief de Sassou, aurait même été reportée pour éviter un scandale local.

Brazzaville accueille également deux figures clés de la région :

  • Alpha Condé, ancien président guinéen,
  • Ousmane Yara, homme d’affaires malien controversé.

Leur présence alimente la thèse d’un trio Sassou – Condé – Yara, déterminé à influencer le futur politique de la Guinée-Bissau. Mais dans quel but ?

Un pays pris en otage

Alors que le peuple bissau-guinéen attend la proclamation officielle des résultats, les manœuvres d’Umaro Sissoco Emballo plongent le pays dans une instabilité profonde.

Entre pressions armées, interventions étrangères et valises d’argent, la Guinée-Bissau vit l’une des crises post-électorales les plus opaques de son histoire récente.

L’avenir immédiat dépendra du courage de la CNE, de la réaction de la CEDEAO et des intentions réelles du trio qui semble tirer les ficelles depuis Brazzaville.

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