Au Sénégal, le « progrès » n’épargne plus les corps. Suppositoires pour grossir, céréales miraculeuses, et bistouri devenu banal… Le culte de l’apparence a envahi le quotidien comme un parfum trop fort dans un taxi sans clim.
Dakar, jadis capitale de la téranga, devient capitale du « térrangisme » facial. Nez rétrécis, lèvres gonflées comme des chambres à air, hanches démesurées dignes d’un giratoire aux Almadies… Le naturel ? Une relique qu’on expose sur les pages Facebook des nostalgiques.
Aujourd’hui, il ne suffit plus d’avoir le cœur sur la main. Il faut des joues saillantes, des cils de 15 cm et un postérieur calibré selon les standards des réseaux sociaux. Comme si l’amour-propre se mesurait en millilitres de silicone.
Mais un corps n’est pas un meuble Ikea qu’on rembourre au gré des tendances. Chaque injection est une roulette russe en seringue dorée. Une liposuccion ratée, et voilà un ventre plus plat que ton compte mobile à la fin du mois — avec en prime des œdèmes dignes d’un remake sénégalais de Shrek.
Alors, une question s’impose : pourquoi prêcher l’amour de soi à 9h sur Instagram, et courir vers Istanbul à 14h pour se faire aspirer le moindre gramme de doute existentiel ? L’estime de soi ne s’achète pas en clinique. Si c’était le cas, nos grand-mères n’auraient jamais eu une ride — ni autant de sagesse.
Aux sœurs (et aux frères qui font ça en douce), il faut se poser la vraie question avant de signer pour un bistouri :
« Suis-je en train de soigner mon complexe, ou de subir celui des autres ? »
Parce qu’au fond, ni les filtres, ni les implants, ni les likes n’effacent le manque le plus profond : celui de s’aimer pour de vrai.