Alors que le Sénégal traverse une crise financière sans précédent, le FMI renforce son implication et s’apprête, en réponse, à dépêcher une mission technique à Dakar afin de relancer les discussions autour d’un nouveau programme d’assistance.
Le Fonds monétaire international a ainsi intensifié ses échanges avec les autorités sénégalaises après que la révélation de dettes non déclarées a profondément fragilisé le pays. Lors d’un point de presse, Julie Kozack, directrice de la communication du FMI, a réaffirmé l’engagement ferme de l’institution à accompagner Dakar, tout en assurant un suivi rigoureux des efforts de transparence budgétaire engagés par le nouveau pouvoir.
Des chiffres largement sous-évalués
Dans un premier temps, un audit diligenté par le président Bassirou Diomaye Faye a révélé un déficit budgétaire de plus de 10 % du PIB à la fin de 2023, soit le double de ce qui avait été annoncé. Par ailleurs, la Cour des comptes a évalué en février 2025 la dette publique à 99,7 % du PIB, contre 74,4 % initialement rapportés. Cette différence provient principalement de prêts dissimulés, estimés entre 7 et 13 milliards de dollars, et a entraîné, en conséquence, la suspension du programme de financement de 1,8 milliard de dollars signé avec le FMI en juin 2023.
Un échange de haut niveau à Washington
Ensuite, le 9 juillet 2025, la première directrice générale adjointe du FMI, Gita Gopinath, a rencontré le président Faye à Washington. Elle a réaffirmé le soutien de l’institution dans cette période critique. Selon Julie Kozack, le président sénégalais a, pour sa part, réitéré l’engagement de son gouvernement à renforcer la transparence et à conduire des réformes structurelles.
Une mission technique en préparation
Dans la foulée, le FMI a annoncé l’envoi d’une équipe technique à Dakar pour la fin août. Cette mission visera, d’une part, à discuter des mesures nécessaires pour présenter le cas des données erronées au Conseil d’administration du FMI, et d’autre part, à poser les bases d’un nouveau programme d’assistance. Simultanément, l’équipe du FMI collaborera avec les autorités sénégalaises pour définir des actions correctives et renforcer les capacités institutionnelles du pays.
L’audit de Forvis Mazars passé au crible
En parallèle, le FMI a confirmé avoir reçu un inventaire préliminaire de la dette, établi par le cabinet Forvis Mazars. « Nos équipes analysent actuellement le rapport, dont les premières conclusions semblent globalement conformes aux attentes », a déclaré Mme Kozack, tout en précisant que le processus de validation finale était en cours.
Selon les évaluations du FMI, la dette cachée du Sénégal atteignait 11,3 milliards de dollars à fin 2023, en incluant les engagements des entreprises publiques. De son côté, l’agence S&P Global Ratings l’a estimée à près de 13 milliards de dollars, abaissant la note souveraine du pays à « B- » avec perspective négative. L’agence a également signalé un ratio dette/PIB de 118 %, l’un des plus élevés du continent parmi les pays de cette catégorie.
Des conséquences immédiates sur les marchés
Depuis la révélation des données falsifiées en septembre 2024, les obligations sénégalaises ont perdu environ 25 % de leur valeur. Cependant, en juillet 2025, les marchés ont réagi positivement à l’annonce d’un recalcul du PIB, qui pourrait mécaniquement réduire le ratio dette/PIB, le rendant plus soutenable aux yeux du FMI et des investisseurs.
Dans le même temps, le gouvernement prévoit de réformer en profondeur la gestion de la dette publique en la centralisant, tout en renforçant le contrôle des projets financés par des partenaires extérieurs.
Une décision très attendue du FMI
Désormais, les autorités sénégalaises comme les investisseurs attendent avec impatience une décision du Conseil d’administration du FMI concernant une dérogation liée aux erreurs de déclaration. Cette dérogation permettrait de relancer formellement les discussions autour d’un nouveau programme. Interrogée sur une possible échéance en septembre 2025, Julie Kozack s’est voulue prudente : « Aucun calendrier officiel n’a encore été fixé, mais nous communiquerons dès qu’un accord aura été conclu au niveau technique. »
En définitive, les résultats de la mission prévue en août et la décision du Conseil d’administration s’annoncent déterminants pour stabiliser les finances publiques sénégalaises et rétablir la confiance entre le pays et ses partenaires financiers internationaux