Un fléau ignoré qui touche les plus jeunes
Chaque année, la Journée mondiale du rein, célébrée le 13 mars, met en lumière les pathologies rénales. En 2024, l’accent est mis sur une réalité méconnue au Sénégal : les maladies rénales chez les enfants. Alors que l’on pense souvent à tort que ces affections concernent uniquement les adultes, la situation est alarmante. Depuis 2017, le service de néphrologie pédiatrique de l’hôpital Abass Ndao de Dakar a accueilli environ 1 600 jeunes patients. Un chiffre révélateur d’une crise sanitaire silencieuse qui mérite une attention immédiate.
Des causes multiples et préventives
Les maladies rénales chez l’enfant ont diverses origines. Les infections mal soignées, telles que les angines ou les gales surinfectées, peuvent entraîner des complications rénales graves. De même, le paludisme sévère est un facteur aggravant. D’un point de vue chronique, les malformations congénitales représentent 20 % des cas recensés, tandis que le syndrome néphrotique idiopathique constitue 40 % des consultations. Cette dernière pathologie, caractérisée par des œdèmes au visage et aux pieds, impose un traitement long et coûteux, inabordable pour de nombreuses familles.
Une prise en charge encore insuffisante
Depuis 2012, l’État a renforcé les infrastructures de dialyse pour adultes, mais les enfants restent largement laissés pour compte. Hors de Dakar, aucun centre de dialyse pédiatrique n’est disponible, obligeant les familles à parcourir de longues distances pour obtenir des soins. Même dans la capitale, les ressources sont insuffisantes : à l’hôpital Abass Ndao, une seule machine est opérationnelle depuis janvier 2024, bien trop peu pour absorber la demande croissante.
L’espoir fragile de la transplantation
Un progrès notable a toutefois été enregistré en novembre 2023 avec les premières transplantations rénales réalisées à l’hôpital Aristide Le Dantec et à l’hôpital militaire de Ouakam. Deux enfants sont actuellement en préparation pour cette intervention. Cependant, les obstacles restent nombreux : la transplantation exige un suivi rigoureux pour éviter tout rejet, et les moyens financiers et logistiques font défaut pour généraliser cette solution.
Des mesures urgentes à prendre
Face à cette situation critique, le professeur Younoussa Keïta, néphrologue pédiatrique, plaide pour la création d’un centre national de dialyse pédiatrique, la formation accrue de spécialistes déployables en régions, une sensibilisation massive au dépistage précoce et une subvention des traitements. Sans ces mesures, de nombreux enfants risquent de voir leur avenir hypothéqué par un système de santé encore insuffisamment adapté à leurs besoins.
La lutte contre les maladies rénales pédiatriques au Sénégal ne peut plus attendre. Il est temps d’agir pour offrir à ces enfants les soins qu’ils méritent.
