L’élection présidentielle camerounaise, prévue pour le 12 octobre, se déroulera sans l’un des principaux opposants au régime. La Commission électorale (Élécam) a publié ce dimanche la liste provisoire des candidats retenus : sur les 83 dossiers déposés, seuls treize ont été validés. Parmi les recalés, figure une exclusion de taille : celle de Maurice Kamto, chef de file du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC).
Paul Biya, toujours en course à 92 ans
Le président sortant Paul Biya, 92 ans, figure en tête de la liste validée par Élécam. Fort de ses 43 années au pouvoir, le dirigeant du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) brigue un huitième mandat consécutif. Face à lui, douze concurrents au profil varié tenteront de faire basculer le scrutin.
Parmi eux, deux anciens ministres désormais passés à l’opposition : Bello Bouba Maïgari pour l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), et Issa Tchiroma Bakary, investi par le Front pour le salut national du Cameroun (FSNC). L’avocat Akéré Muna, qui s’était désisté en faveur de Maurice Kamto en 2018, revient cette fois en tant que candidat du parti Univers, tout en se disant favorable à une candidature unifiée de l’opposition.
Une opposition fragmentée mais active
Autre figure bien connue, Joshua Osih, héritier politique du défunt opposant John Fru Ndi, représente une nouvelle fois le Front social démocrate (SDF). Seule femme en lice, Tomaïno Ndam Njoya, maire de Foumban et présidente de l’Union démocratique du Cameroun (UDC), fait également partie des candidats retenus. Deux nouveaux visages émergent aussi : Hilaire Zipang (Mouvement progressiste) et Samuel Hiram Iyodi (FDC), ce dernier étant le plus jeune candidat à 37 ans.
Une éviction controversée
Mais c’est bien l’absence de Maurice Kamto qui suscite le plus de réactions. Élécam justifie son rejet en invoquant une double candidature émanant du même parti, le Manidem (Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie), qui a officiellement investi Kamto. Or, selon la commission, le parti avait déjà présenté un autre candidat : Dieudonné Yebga.
Pour Anicet Ékané, président du Manidem, cette décision relève d’une « manœuvre grossière » orchestrée par le gouvernement pour disqualifier Kamto. Il rappelle que Dieudonné Yebga a été exclu du parti, et que cette exclusion a été validée tant par la justice que par le ministère de l’Administration territoriale (Minat). « Il n’existe aucun doute sur la légitimité de notre décision. L’Élécam a fermé les yeux volontairement », accuse-t-il, annonçant un recours imminent devant le Conseil constitutionnel.
Climat tendu à Yaoundé
Pour le politologue Njoya Moussa, cette exclusion n’est qu’une « demi-surprise ». Il évoque les tensions des derniers jours, notamment l’arrivée précipitée d’un second candidat du Manidem et la forte présence sécuritaire à Yaoundé. « Les autorités redoutaient clairement des troubles », affirme-t-il.
De son côté, Paul Mahel, conseiller d’Akéré Muna, appelle Kamto à ne pas se retirer du jeu politique. « Il n’y a pas de recalé dans l’opposition », déclare-t-il. « Même s’il ne peut pas se présenter, Kamto peut encore jouer un rôle stratégique en soutenant une coalition. »