Le 17 décembre 1962 marque un tournant dans la vie de Mamadou Dia. En ce jour, le président du Conseil des ministres fait face à une fronde politique. Les députés sénégalais, soutenus par le président Léopold Sédar Senghor, veulent le renverser. Ils projettent de voter une motion de censure pour lui retirer le pouvoir. Pour contrer cette initiative, Mamadou Dia ordonne à l’armée d’intervenir dans l’Assemblée nationale. Cependant, les soldats finissent par rester loyaux à Senghor et arrêtent Dia. Cet événement marquera le début des épreuves politiques et personnelles pour Mamadou Dia.
Derrière le Surnom « Maodo »
Proche de sa famille, Mamadou Dia était affectueusement surnommé « Maodo ». Ce nom tendre cachait un homme politique déterminé et redouté. Il rêvait d’un Sénégal autonome, économiquement fort et pleinement souverain.
Procès et Déportation en 1963
L’année 1963 bouleverse l’existence de Mamadou Dia. Accusé de tentative de coup d’État, il est traduit devant la Haute Cour de justice. Condamné avec plusieurs ministres, dont Waldiodio Ndiaye, Dia reçoit une peine lourde. Il est déporté à Kédoudou, à 500 kilomètres à l’est du Sénégal. Cette déportation « perpétuelle dans une enceinte fortifiée » met fin à ses ambitions politiques. Dia reste emprisonné jusqu’en 1974, tandis que le Sénégal poursuit son chemin sans lui.
L’Engagement Socialiste de Mamadou Dia
Économiste de formation, Mamadou Dia était un fervent défenseur du socialisme. Il militait pour l’autosuffisance alimentaire et la réduction de la dépendance économique vis-à-vis de la France. Il critiquait l’industrie arachidière héritée de l’époque coloniale. Dia prônait une agriculture vivrière destinée à satisfaire les besoins locaux. Cette vision froissait à la fois les intérêts français et certains députés sénégalais.
Mamadou Dia avait aussi une position ferme sur la rupture avec Paris. Cofondateur du Bloc populaire sénégalais avec Senghor en 1948, il avait siégé au Sénat français et à l’Assemblée nationale française. En 1961, il publia un ouvrage critiquant « le fétichisme de l’argent » et les « tyrannies des civilisations dites évoluées », dont la France faisait partie.
Tentative de Retour en Politique
Libéré en 1974, Mamadou Dia tente de revenir sur la scène politique sénégalaise. Il défend un « socialisme autogestionnaire » en opposition à l’idéologie dominante. Dia critique le régime en place, accusant ses dirigeants de privilégier « la bourgeoisie au détriment des masses ». Toutefois, son retour en politique échoue à rallier un large soutien populaire.
Une Figure Respectée mais Controversée
Malgré ses échecs politiques, Mamadou Dia reste une figure respectée. Il exprime une immense tristesse à la mort de son rival Senghor en 2001. Toutefois, il critique sévèrement les politiques économiques libérales du président Abdoulaye Wade. À la fin de sa vie, Dia dénonce l’éloignement du Sénégal des idéaux d’égalité qu’il défendait dans sa jeunesse.
Un Héritage Vivant
Seize ans après sa disparition, Mamadou Dia continue d’inspirer réflexions et débats au Sénégal. Son engagement pour un développement économique et social demeure une source d’inspiration. Lors de son installation, le président de l’Assemblée nationale, El Malick Ndiaye, lui rend un vibrant hommage. Le parcours de Mamadou Dia reste un modèle pour les générations futures.
